Lightning Returns: Final Fantasy XIII

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Le 24 mars 2014 à 11:19 par Bastien 0 commentaire
Lightning Returns: Final Fantasy XIII

Pour la première fois dans l'histoire de la série Final Fantasy, un épisode canonique voit son univers se déployer au cours de trois aventures. L'ambition d'enrichir la très copieuse mythologie Fabula Nova Crystallis est évidemment couplée à un besoin de rentabiliser les coûts de production des outils nécessaires au développement de Final Fantasy XIII. Pour autant, ses suites n'ont pas été le fruit du hasard, les créateurs ayant pris le soin d'innover, et d'écouter les doléances des joueurs. Troisième tentative, pour en finir avec cette génération de consoles... En temps et en heure.

Minuit moins cinq

Alors que Final Fantasy XIII-2 embrassait la thématique du voyage dans le temps, ce nouveau chapitre s'inspire d'un concept historique plus étonnant. L'horloge de l'Apocalypse, imaginée au début de la guerre froide par un groupe de scientifiques et d'intellectuels américains, est une métaphore des menaces nucléaires, climatiques et géopolitiques qui pèsent sur la Terre. Depuis près de 70 ans, ses aiguilles sont mises à jour et flirtent avec l'heure fatidique, minuit, selon les conflits, les menaces et les décisions qui ponctuent notre époque. Passionnés par cette analogie, les créateurs de Lightning Returns en ont puisé toute la dramaturgie pour la retranscrire dans le monde de Nova Chrysalia. Car le temps, c'est bel et bien ce qui préoccupera Lightning, réveillée d'un long sommeil de quelques 500 ans. Depuis la défaite de Caius, le chaos s'est propagé, plongeant le monde dans l'obscurité la plus terrifiante. Les rares survivants des régions épargnées n'attendent qu'une chose : cette fameuse Apocalypse qui les frappera dans 6 jours. Leur seul espoir ? Vous. La Libératrice à la merci de Bhunivelze, qui pourra repousser l'échéance de la catastrophe en sauvant les âmes qui se dresseront sur son chemin.

Si ce scénario reste très classique dans ses grandes lignes, il apporte deux dimensions cruciales à cet épisode. Tout d'abord, une tension encore jamais ressentie dans un Final Fantasy. Avec cette bonne dose de fatalité à chaque coin de rue, le tableau dépeint tout au long de l'aventure est d'une noirceur terrible, obligeant même la belle Claire Farron à se permettre une certaine véhémence. Luxerion, le point de départ de cette épopée, traduit parfaitement ce malaise : les rues sont tristes et certaines zones mal famées la nuit tombée... Mais cet épilogue tire aussi sur la corde sensible de la nostalgie, facilitée par le méli-mélo temporel survenu dans Final Fantasy XIII-2. Bien que le monde soit totalement nouveau, tous les personnages principaux de la saga font une apparition remarquée ; et s'il est plaisant de les retrouver, certains devenus des épaves font peine à voir. Hope, lui, est resté jeune et en pleine forme. Installé à l'Arche aux côtés de l'Yggdrasil où il accueille Lightning tous les matins à 6h00, il semble être votre principal allié dans cette course contre-la-mort. Parmi les nouvelles têtes, Lumina, une petite peste qui tient les rennes de cette grande mascarade. Mais vous commencez à connaître la chanson : les apparences sont parfois trompeuses...

Le temps n'attend pas

Si la fuite des héros de Final Fantasy XIII n'était en réalité soutenue que par le scénario, l'écoulement du temps dans Lightning Returns a cette fois un impact direct sur l'environnement et la nature même de la partie. À Luxerion, Yusnaan, dans les Terres sauvages et les Dunes de la mort – les quatre régions fréquentables du jeu – certaines zones ne sont par exemple ouvertes qu'à certaines heures, contraignant le joueur à revenir plus tard dans la journée voire même à reporter au lendemain la dernière étape d'une quête. Là est l'une des premières difficultés que l'on rencontre au début de l'aventure : organiser son agenda pour être le plus efficace possible, aller à l'essentiel sans snober les quêtes annexes, pour faire fleurir l'Yggdrasil et repousser d'un ou deux jours de plus la catastrophe. Pour gagner de précieuses heures, le pouvoir de Chronostase offre, au prix de quelques Points d'Énergie glanés au cours des combats, un certain répit. Les montres s'arrêtent alors, pour une très courte durée. C'est au treizième jour que le dénouement survient. Si Lightning ne sauve pas suffisamment d'âmes pour l'atteindre, la partie se termine purement et simplement par un sinistre « Game Over ». Avec 20 quêtes principales, une soixantaine de quêtes annexes et une centaine de petites chasses aux objets, le challenge est de taille. XIII et XIII-2 étaient des promenades de santé à titre de comparaison, mais cela dénote une volonté de ne plus seulement s'adresser au grand public. Les novices, eux, peuvent toujours s'essayer au mode facile pour adoucir l'expérience et se concentrer sur la trame principale en 30 heures... Pour mieux explorer le jeu lors d'une seconde partie.

« Ce n'est pas forcément un monde ouvert, mais la carte est énorme malgré tout. » Yoshinori Kitase n'a jamais promis monts et merveilles, mais a toujours assuré s'attacher à la sensation de liberté, telle que nous la connaissions dans Final Fantasy XII par exemple. Lightning Returns réussit en partie ce pari : les Dunes de la mort et les Terres sauvages sont vastes, et ne sont pas sans rappeler la formidable steppe d'Archylte. La carte est étendue, si bien qu'il vous faudra des téléporteurs ou un sympathique chocobo pour rejoindre les objectifs en temps et en heure. En revanche, Luxerion et Yusnaan restent deux villes à taille humaine, certes animées, mais pas vraiment vertigineuses comme pouvait l'être Eden et Academia. Et bien que chaque région ait son identité, on regrette rapidement l'épique voyage et le goût de l'aventure que procurait le premier chapitre de la saga. Le morcellement du scénario est aussi responsable de cette frustration : le pouvoir au joueur, pourquoi pas, mais la progression non-linéaire impacte directement la cohérence du récit. La dernière ligne droite tend à recoller les morceaux, et offre un final des plus épiques, quoi qu'un peu naïf

Fashion Week

Depuis ses débuts, la série nous a habitué à des héros radicalement différents permettant d'aborder de multiples styles de combat, Lightning Returns est une ode à la solitude. La Libératrice est à quelques rares occasions rejointe par un co-équipier contrôlé par l'intelligence artificielle, mais elle ne doit compter que sur elle-même pour abattre les dizaines d'adversaires qui se dressent sur son chemin. Pour ne pas endormir le joueur, un nouveau système de combat mêlant les célèbres jauges ATB et des commandes en temps réel a été conçu. Celui-ci est couplé à une personnalisation poussée de Light, reposant sur les différentes tenues à collectionner en terminant des quêtes, récupérant des trésors, ou en dévalisant les boutiques. Chaque tenue – il y en a 80 au total – change non seulement l'apparence de l'héroïne, la taille de sa poitrine, mais aussi ses statistiques, les compétences et l'équipement que vous lui associez. Certaines sont optimisées pour la magie, le corps-à-corps ou la défense... D'autres sont plus équilibrées. Seulement trois tenues peuvent être actives, le temps passé dans les menus est donc précieux.

Plus que jamais, la stratégie est au cœur des batailles. Plus que jamais, les magies élémentaires, facteur cher au jeu de rôle japonais, sont à l'honneur. Certaines bestioles, même les plus inoffensives, peuvent vous tenir tête une dizaine de minutes si vous n'avez pas préparé correctement votre garde-robe. Ainsi, l'évolution du personnage ne repose pas sur un niveau, mais sur ses statistiques propres (améliorées en accomplissant des quêtes), ses armes (à acheter ou à gagner) et ses compétences (principalement collectées en combat). Plus tard dans le jeu, on découvre une nouvelle surcouche de personnalisation : la fusion de deux compétences identiques pour en créer une plus puissante, l'amélioration des armes, des boucliers et les accessoires renforcés – tous les trois exclusifs au mode New Game+. Les boss sont naturellement les obstacles les plus coriaces, nécessitant d'alterner entre des attaques magiques légères pour placer l'ennemi en situation de choc, de lourdes attaques physiques pour faire chuter sa jauge de PV, et des gardes bien rythmées pour prévenir les enchaînements les plus dévastateurs. À cela s'ajoute la Chronodilatation, qui contre quelques PE permet de suspendre le temps pour assaillir un adversaire en état de choc. Cette alchimie de bonnes idées et l'ultra-personnalisation assez adictive, bien qu'un peu ridicule en ce qui concerne les ornements, est tout simplement ce qui s'est fait de mieux ces dernières années en la matière.

Chaos technique

N'y allons pas par quatre chemins : ce dernier effort est une déception technique. Pourtant, les inspirations et le travail préliminaire d'Isamu Kamikokuryô sont, comme toujours, somptueux. Les Dunes et ses ruines, par exemple, dégagent une inquiétante sensation au fur et à mesure que le soleil s'endort. La cathédrale de Luxerion, inspirée de celle qui trône à Cologne, est aussi grandiose à l'extérieur qu'à l'intérieur. Mais l'intention ne suffit pas. Partout, les textures sont dessinées au couteau. Partout, la distance d'affichage est telle que les habitants surgissent de nulle part. Partout, le framerate souffre de baisses constantes, difficiles à expliquer. Ces lacunes ne remettent pas en question le talent des développeurs de Square Enix, mais plutôt le budget et le soin qui a été apporté à l'optimisation du jeu. Sans aucun doute fallait-il que cette ultime aventure sur PlayStation 3 et Xbox 360 soit commercialisée le plus tôt possible. Sans aucun doute les complications financières du studio ont directement impacté le développement du projet. Le résultat, bien que tout à fait jouable, fait un peu de peine à voir.

Les oreilles, elles, en prennent plein la vue. Les compositions très éclectiques du trio Masashi Hamauzu, Naoshi Mizuta et Mitsuto Suzuki avaient surpris dans XIII-2, leur créativité musicale n'a pas dit son dernier mot. Au menu de cette copieuse bande originale de 74 titres, des mélodies entrainantes enrichies par des instruments et des chants empruntés aux quatre coins du monde (Desert LullabyOuroboros Fiesta). Les thèmes d'exploration, somptueux, sentent bon la découverte et l'envie d'ailleurs. Ceux qui accompagnent les cinématiques les plus importantes sont pleins de vitamines, épiques, grandioses tout simplement. Les accompagnements qui rythment les combats sont plus expérimentaux, n'hésitant pas à flirter avec le hip-hop et l'electro d'un goût discutable (High Voltage). Que l'on accroche ou non aux écarts les plus curieux, peut-être qu'un jour la richesse des musiques de la saga Final Fantasy XIII fera comprendre aux fans désespérément nostalgiques que Nobuo Uematsu n'est pas le seul à se montrer à la hauteur de ses ambitions

Avec son scénario résolument plus mature, ses vastes environnements, sa difficulté assumée et ses idées de gameplay innovantes, Lightning Returnsavait tout pour devenir la réponse parfaite aux critiques des joueurs. Malheureusement, le temps a manqué aux développeurs pour peaufiner cette conclusion qui, sur le plan technique, n'est pas digne d'un jeu de fin de génération. Le temps manque aussi cruellement au joueur, qui ne peut pas profiter sereinement de cet ultime voyage, toujours rappelé à l'ordre par les gongs qui ponctuent les journées. Les hardcore gamers apprécieront tout de même le challenge et la générosité de Nova Chrysalia.

14
L'ambiance inquiétante au top
Combats dynamiques et exigeants
Grands espaces et quêtes annexe
La sensation d'être contraint
Grosses lacunes graphiques
Un scénario un peu trop morcellé