Peu de séries peuvent se vanter d'avoir 25 ans en 2012. Peu de studios ont eu la chance de faire vivre une licence durant toutes ses années, traversant des générations de consoles, de technologies, de publics et de tendances. Aujourd'hui, 18 décembre, la série Final Fantasy souffle sa vingt-cinquième bougie, avec à son compteur quatorze épisodes principaux, quelques aventures annexes et beaucoup de spin-off plus ou moins réussis. Des statistiques impressionnantes pour une saga qui, rappelons-le, a démarré sur une dernière chance, un malentendu inespéré.
L'un des acteurs principaux de cette grande sucess story s'appelle Hironobu Sakaguchi. Certains le regrettent amèrement, d'autres acceptent que la série est faite pour évoluer. Certains scandent que « c'était mieux avant », d'autres apprécient tout simplement ce que Square Enix leur offre à chaque nouveau projet. Au beau milieu de ces quatorze épopées de plus en plus discutées, une expérience est rarement contestée : Final Fantasy VII. Pourquoi, donc, ne pas s'offrir un petit retour dans le passé, au détour d'une interview de Monsieur Sakaguchi parue en 1997 dans le magazine américain PlayStation Underground, quelques jours après la sortie du RPG le plus populaire de l'Histoire du jeu vidéo. Bon anniversaire à cette série qui m'est chère, qui vous tient sûrement à cur si vous lisez ces lignes, et qui nous réserve encore bien des surprises.
Pourquoi Squaresoft ne publie-t-il Final Fantasy VII que sur console Playstation ?
Hironobu Sakaguchi : Au mois d'août 1995 s'est tenu à Los Angeles l'un des plus grand salon dédié à l'image de synthèse, le Siggraph. À cette époque, nous n'étions pas sûrs de ce à quoi la prochaine génération de RPG ressemblerait. Ainsi, en guise d'expérimentation, nous avons créé et présenté une démonstration interactive, entre le jeu et la cinématique. Elle se focalisait sur les scènes de combats qui étaient entièrement réalisées en temps réel, avec des polygones. Cela devint les prémices de Final Fantasy VII et nous avons décidé de continuer ce jeu reposant sur de nombreuses images de synthèse.
Quand nous avons discuté des décors et que se posait la question de l'illustration ou de l'image de synthèse, nous avons eu l'idée d'éliminer toute transition entre les cinématiques et les environnements. En s'affranchissant de cette coupure, et en maintenant la qualité, nous voulions faire en sorte que la vidéo s'arrête et que les personnages se déplacent dans cet espace. Nous avons essayé de rendre possible les interactions pendant les séquences cinématiques. Au final, en utilisant beaucoup de données de mouvement et des effets CG, nous avions fait un jeu beaucoup trop volumineux, qui devait tenir sur un support CD-Rom. Cela nous a posé beaucoup de problèmes.
Pourquoi aviez-vous besoin d'une si grande équipe ?
Hironobu Sakaguchi : Une grande équipe ne fait pas nécessairement un meilleur jeu, mais quand un projet devient aussi important, les dépenses se multiplient, et il est impératif de travailler avec une équipe très qualifiée.
Nous avons eu l'occasion de travailler sur des machines modernes avec une équipe d'environ cent personnes, et je pense qu'il s'agissait de l'une des plus grandes équipes de développement dans l'histoire. Finalement, le jeu complet dégage beaucoup d'énergie. Selon moi, si une ou dix personnes réalisent le même jeu, un jeu de courses ou quoi que ce soit d'autre, celui créé par le groupe sera plus riche en possibilités. Avec davantage de ressources et autant de passion émanant de chaque individu, cela procure une véritable profondeur qui se ressent dans le jeu final.
Comment le cinéma a-t-il influencé votre conception du jeu vidéo ?
Hironobu Sakaguchi : Il est facile d'être émotionnellement touché par un film ou un jeu, de différentes façons. En ajoutant de l'interactivité aux cinématiques, je pense que les joueurs peuvent aller au-delà, voire même ne faire plus qu'un avec les images. J'ai toujours accordé beaucoup d'importance au visuel et au son, car je n'ai pas seulement envie que mes jeux soient équivalents aux films. Je veux qu'ils les surpassent. C'est mon objectif.
Pourquoi Final Fantasy VII bénéficie-t-il d'un si bon accueil ?
Hironobu Sakaguchi : Sans changer les fondamentaux du système, les graphismes et les effets sonores ont été significativement améliorés pour que le jeu procure de véritables émotions aux joueurs. Certains RPG proposent de belles images et compositions aux joueurs, mais leur empêchent d'avoir un contrôle total. Pour éviter cela, nous avons fait de nombreuses études pendant le développement de Final Fantasy V et VI afin de savoir comment impliquer davantage les joueurs dans une aventure, tout en améliorant les graphismes et la musique. Le fruit de nos recherches s'est retrouvé dans Final Fantasy VII.
Quels sont les nouvelles thématiques abordées dans Final Fantasy VII ?
Hironobu Sakaguchi : Au cours du développement de Final Fantasy III, ma mère est décédée. Depuis, la thématique de la vie hante mes pensées. La vie existe dans tout ce qui nous entoure, et j'étais curieux de voir ce qui se passerait si j'analysais la vie dans ses définitions mathématique et logique. C'était sûrement ma façon de lutter contre l'évènement auquel je faisais face. C'est la première fois dans la série que ce thème apparaît dans le jeu, au sens propre.
Comment s'est passée la collaboration avec le réalisateur Yoshinori Kitase ?
Hironobu Sakaguchi : Je travaille avec lui depuis Final Fantasy V. Quand il a rejoint Square, il m'a confié qu'il désirait initialement être réalisateur de films, mais il pensait que c'était impossible au Japon. Avant son arrivée, les Final Fantasy étaient des spectacles de marionnettes. Il a produit un vrai travail cinématographique, avec des effets innovants et des angles de caméras différents. Son expérience acquise aux cours de ses études de cinématographie et des films qu'il a réalisés ont beaucoup apporté durant le processus de création. Il est le réalisateur du jeu.
À votre tour de livrer votre sentiment. Quand avez-vous découvert la série ? Quels souvenirs en gardez-vous ?