Il ne fallait pas être particulièrement sévère avec Final Fantasy XV pour pointer du doigt les importantes coupes franches que Square Enix s'est permis d'opérer sur le scénario à sa sortie. Je suis d'ailleurs longuement revenu sur le sujet dans un article consacré aux nombreux écueils narratifs dans lesquels tombe l'aventure, notamment aux portes de la conclusion. Parmi les incompréhensions figuraient aussi les non-dits de Gladiolus au cours du chapitre 8. Après avoir soudainement pris la fuite, le bouclier du roi revenait quelques heures plus tard avec une balafre au visage, ce qui ne semblait pas particulièrement émouvoir ses camarades. Une ode au DLC décomplexée qui prend fin aujourd'hui avec le premier contenu scénaristique du jeu, le premier d'une série de trois, vendu 4,99 €. Verdict.
Cet article ne contient aucun spoiler concernant les surprises scénaristiques de ce DLC.
À bras le Cor
Prendre les rênes de Gladiolus le temps d'une quête peut paraître anodin, mais c'est évidemment un petit chamboulement dans la philosophie de Final Fantasy XV qui ne permet pas au joueur d'incarner quelqu'un d'autre que Noctis. L'Épisode Gladiolus change donc la donne, et propose même de retrouver Cor l'Immortel qui l'accompagne au cours de ce parcours initiatique. Un segment bourré de testostérone également marqué par la présence exceptionnelle d'un invité prestigieux issu de la mythologie de la série, qui joue ici le rôle d'un maître d'armes qui confère aux Boucliers leur force redoutable et leur légitimité auprès du roi. Ponctué de courtes séquences de dialogues pendant l'exploration ou près des feux de camp, cet épisode semble finalement donner plus de détails sur le passé de Cor et sur sa réputation de guerrier « invaincu » que sur Gladiolus lui-même. L'ensemble reste assez léger, et tient plutôt de l'anecdote.
Afin de proposer autre chose qu'un simple bout de scénario, les développeurs ont imaginé avec ces contenus téléchargeables des expériences différentes. Celui de Gladiolus met l'accent sur les combats, avec un système légèrement différent de celui du jeu, privilégiant la défense et la contre-attaque, les esquives et les coups spéciaux chargés. Avec plusieurs nouvelles jauges, un multiplicateur de dégâts et la possibilité de saisir des piliers pour nettoyer la zone, le gameplay gagne en brutalité mais perd en verticalité et en fluidité (on regrette vite les téléportations instantanées de Noctis). Bien qu'assez permissif et moins élaboré, le système de défense et de contre-attaque s'inspire des franchises comme Dark Souls et Bloodborne, ce qui n'est pas étonnant quand on sait que le producteur des DLC, Haruyoshi Sawatari, vient de quitter les studios de Bandai Namco. L'ambiance du donjon, les divines guitares saturées de Keiichi Okabe et le bestiaire gothique à souhait confirment également cette impression plutôt agréable d'aterrir dans une ambiance totalement nouvelle le temps d'une courte aventure.
À bord du violent express
« Courte » est un euphémisme. Dirigiste et linéaire au possible, ce DLC peut facilement être bouclé en une heure, en prenant pourtant le soin de scruter les moindres recoins à la recherche d'objets utiles. On ne trouvera finalement que des Potions et des Queues de Phénix, malheureusement jamais cachées dans les caisses ou les tonneaux que les développeurs ont pourtant rendus destructibles. Pour quoi faire, si tous ces éléments de décor demeurent vides ? L'environnement, bien que très réussi esthétiquement, se présente comme une succession de couloirs et de salles d'épreuves dans lesquelles Gladiolus doit affronter des boss assez inoffensifs pour débloquer de nouvelles compétences avant d'en découdre avec son véritable adversaire. Ce combat final est plutôt bien équilibré et plus intéressant que tous les autres qui le précèdent.
Ce sont finalement les contenus débloqués à l'issue d'une première partie qui constitueront le véritable challenge : le mode de combat amical contre Cor, par exemple, est particulièrement crispant, car l'Immortel est aussi violent qu'agile. Il s'agit clairement d'une épreuve qui demande dextérité et patience, d'autant plus que le nombre d'objets de soin y est limité. Malheureusement, la rejouabilité de ce DLC est quasi nulle une fois les quelques challenges supplémentaires et les récompenses obtenus. On regrette qu'il soit d'ailleurs totalement décorrelé de la progression principale : comme dans le chapitre 13 bis fraîchement ajouté, le niveau et l'équipement de Gladiolus sont bloqués, quels que soient vos exploits déjà effectués dans l'aventure principale. Il est fort probable que les épisodes consacrés à Prompto et Ignis empruntent également cette voie. Reste à savoir si le quatrième DLC, le mystérieux mode multijoueur, s'intégrera de manière plus organique pour faire de Final Fantasy XV une œuvre moins morcelée qu'elle ne l'est aujourd'hui.
Avec son gameplay original et son ambiance très marquée, Final Fantasy XV Episode Gladiolus était attendu comme une réponse intelligente des développeurs aux oublis scénaristiques du jeu. Jouissif à prendre en main, plutôt joli à regarder et fluide du début à la fin, ce DLC se montre malheureusement trop avare pour les joueurs qui seront passés à la caisse. Plié en une heure, complété à 100 % en deux, il offre certes un combat au sommet entre Gladiolus et son redoutable adversaire mais ne restera pas dans les annales des DLC les plus généreux de son époque — il faut dire que The Witcher 3, pour ne citer que lui, est un sérieux concurrent en la matière.